Louis-Diogène Guiraldenc

Louis-Diogène Guiraldenc (1840-1869) was a poet from Montpellier. Ten of his poems, written in the Montpellieran dialect of Occitan, were published after his death by Alphonse Roque-Ferrier (1844-1907), secretary of the Société pour l'étude des langues romanes, in the Revue des Langues Romanes between 1880 and 1882. In 1884 the first edition of a collection of his poems was published.

A second edition of this collection (Poésies Languedociennes de Louis-Diogène Guiraldenc (1840-1869) publiées pour la première fois d'après le manuscrit original de l'auteur précédées d'une Notice biographique et littéraire et annotées au point de vue du langage courant de Montpellier par A. Roque-Ferrier) was published in 1888 with an appendix containing two additional poems.

Publication from 1888 lying on a wooden desk showing its cover.
Second edition (1888) of the original collection of Guiraldenc's poetry with commentary by A. Roque-Ferrier, kept at the Médiathèque Émile Zola in Montpellier.

Here I've transcribed this second edition, including the introduction by Roque-Ferrier, the ten primary poems, and the appendix with the two additional poems. I've also translated the introduction and appendix, and am working on translating the poems as well.

Table of Contents

  1. Original version
    1. Introduction
    2. Observations
    3. Appendice
    4. La Tombe de Guiraldenc
  2. English translation
    1. Introduction
    2. Observations
    3. Appendix
    4. Guiraldenc's Tomb
  3. Poems:
    1. À Madoumaisela Anna C.
    2. Souvenì d'una journada de mai
    3. L'age de Vint Ans
    4. La Gloriousa
    5. La Masca
    6. La Blanda
    7. À Madoumaisela …
    8. À la Mount-pelieirenca
    9. Lous Nouvels Troubadous
    10. Lou Poutou
    11. À Madoumaisela I. T.
    12. Lou Roussignòu

Original version

The following is the original introduction, appendix, and final note of acknowledgements in French by A. Roque-Ferrier. The two poems in occitan from the appendix have been moved to their own pages like the others.

Diogène Guiraldenc

Sa Vie et ses Poésies Languedociennes et Françaises

Celui dont on lira plus loin les poésies languedociennes[1] est mort à Montpellier, le 23 octobre 1869, sans que personne, sauf peut-être deux ou trois amis, se soit douté de la perte que la philologie et la littérature des idiomes méridionaux faisaient en lui.

Rien de plus triste, de plus navrant même, que l'existence du pauvre poëte: « Diogène Guiraldenc, veut bien me dire M. Barthélemy Martin[2], dans une note biographique dont je reproduis les lignes émues, naquit à Montpellier le 1re novembre 1840, dans une maison de la rue Argenterie, du mariage de Jean-François Guiraldenc, ancien sous-officier du génie, plus tard petit marchand épicier, et de Marie-Marguerite-Josephine Coudougnion. La mort de son père le laissa presque sans ressources à l'âge de onze ans.

» La mère du poëte était une chétive créature, incapable de continuer les affaires de son mari et même de gagner sa vie de toute autre manière. Se résignant à la misère, elle accepta une place de concierge dans la maison qu'elle habitait; mais elle ne put consentir à faire cesser à son enfant, frêle comme elle, les études qu'il avait commencées; elle ne voulut point lui imposer le dur travail de l'atelier. Par un de ces prodiges dont les mères seules ont le secret et au prix de sacrifices sans nombre, elle parvint à le tenir au lycée jusqu'à ce qu'il eût obtenu ses deux baccalauréats. »

Dans une de ses pièces, notre poëte parle ainsi de sa jeunesse, de ses lectures et de ses premières ambitions littéraires:

O jeunesse candide, à ta noble attitude
Venaient s'unir la paix, le culte de l'étude,
Un attrait vers le vrai, vers le beau, vers le bien,
L'amour et l'amitié, tous les deux mon soutien.
Combien j'étais joyeux en mon humble demeure,
Près de ma mère seul qui voulut de bonne heure
Instruire mon esprit pour bien tremper mon cœur,
Qui n'épargna ni bien, ni santé, ni labeur !
Combien j'étais joyeux d'admirer les génies
De la Grèce et de Rome en leurs œuvres bénies,
Et, sans dessein fixé, de cueillir au hasard
Les chefs-d'œuvre éternels de leur langue et de l'art !
Oh ! si l'on m'avait vu, pris d'une ardeur fiévreuse,
Foulant de nos auteurs la moisson trop nombreuse,
Ne daignant m'arrêter que devant les épis
Les plus grands, les plus mûrs, que m'offraient leur écrits,
Puis à ce pur froment du nord de notre France
Essayant de mêler le miel de la Provence,
Ce miel qu'un autre siècle avait failli tarir
Et qu'un essaim nouveau...........
......................
Entasse maintenant au fond de sa cellule.
Blâmerait-on mes vœux pour ce temps regretté
Où je coulais mes jours dans la félicité,
Dans la félicité que je dois à ma mère ?
Hélas ! quand sous la mort succomba mon doux père,
J'avais vu dix printemps, et je ne savais pas
Mesurer ma douleur au vide du trépas !
Pourquoi n'a-t-il vécu ? Maintenant mon hommage
Répartirait entre eux le prix de leur ouvrage !

» Guiraldenc commença bien jeune à donner quelques leçons; si modeste que fût cette ressource, il n'était pas en situation de la négliger.

Il songea ensuite à faire des études de médecine, pour lesquelles il avait une certaine inclination, et, pendant la préparation de ses baccalauréats, il assistait déjà aux cours de l'Ecole et suivait les étudiants dans les hôpitaux.

» La place de préparateur à la Faculté des sciences étant devenue vacante, Guiraldenc essaya de l'obtenir, avec l'espoir d'y poursuivre avantageusement ses études. Malheureusement pour lui, sa santé, déjà chancelante et profondément altérée par les privations et les fatigues, l'obligea de se retirer.

» On nous pardonnera d'entrer ici dans quelques détails qui font ressortir tout ce qu'il y a de touchant dans la vie de notre poëte.

» Guiraldenc aimait sa mère à l'excès, et, pour conserver à la pauvre femme l'humble charge que ses forces ne lui permettaient pas toujours de remplir, c'était lui qui la suppléait dans ses travaux les plus pénibles. Il était le premier levé et le dernier couché dans la maison. C'était lui encore qui allait chercher l'eau, qui montait le bois, nettoyait l'escalier, sans que jamais une plainte s'échappât de ses lèvres[3].

» Ce rude travail, Guiraldenc l'a commencé dès ses premières années, alors qu'il était au collége, et ne l'a cessé que quelques jours avant sa mort.

» La jeunesse de notre poëte avait cependant résisté aux commencements de la maladie dont était atteint. Il se rétablit même assez bien, et se contenta de ses leçons jusqu'en 1863.

» A cette époque, voulant sortir d'une situation en somme fort précaire, il eut l'idée d'entrer dans l'administration des douanes, concourut heureusement et, après deux ans de surnumérariat (1er février 1863-1er février 1865), fut nommé commis aux Peschiers (direction de Toulon).

» Le jour de cette nomination impatiemment attendue fut un jour de bonheur pour le fils et la mère, mais il devait rester sans lendemain.

» Par une étrange fatalité, on persuada à Mme veuve Guiraldenc que le climat des Peschiers serait contraire à la santé de son enfant et qu'il y succomberait infailliblement. Rien ne put vaincre ses aveugles terreurs. Guiraldenc, comprenant que la vie de sa mère dépendait de la résolution qu'il prendrait, donna sa démission.

» C'étaient deux années perdues et une nouvelle carrière à trouver. Guiraldenc, âgé de vingt-cinq ans, ne savait quelle voie prendre. Pendant deux autres années, il végète, poussé vers des côtés divers par les personnes qui s'intéressent à lui. C'est ainsi qu'il traverse les bureaux du trésorier-payeur de l'Hérault, puis ceux de la maison de banque Tissié-Sarrus[4], où il devait rencontrer en M. Coulet[5] le dernier contemporain de l'école de Tandon et des frères Rigaud. Il devint ensuite préparateur de M. Béchamp, alors professeur de chimie à la Faculté des sciences, et enfin secrétaire de M. Belin, professeur de rhétorique au lycée de Montpellier.

» Grâce à l'affectueuse bonté de M. Belin, Guiraldenc, qui se trouvait d'ailleurs dans le milieu qui lui convenait, reprit un peu confiance; mais ses espérances devaient être bientôt brisées. M. Belin mourait au mois de juin 1868, et le malheureux jeune homme resta de nouveau sans position et sans appui.

» Un des meilleurs amis de ce maître regretté, M. Cambouliù, alors dans tout l'éclat de son enseignement à la Faculté des lettres de Montpellier, eut pitié de l'infortuné Guiraldenc et voulut se l'attacher en qualité de secrétaire. Le brillant professeur venait de fonder la Société pour l'étude des langues romanes, et il en espérait les meilleurs fruits. Guiraldenc se promettait également d'y trouver des éléments d'étude et de succès, lorsque la mort en décida d'une autre façon, aussi bien pour le maître que pour l'élève.

» Cambouliù tomba malade, et son état eut bientôt un tel caractère de gravité que Guiraldenc ne s'illusionna pas longtemps sur le nouveau coup qui allait le frapper. La mesure de ses déboires était désormais comblée: le mal qui le minait fit de rapides progrès, et il s'éteignit le 23 octobre 1869, à l'âge de vingt-neuf ans[6]. M. Cambouliù ne lui survécut que trois jours.

» La pauvre mère de Guiraldenc traîna, pendant près de deux ans, la plus douloureuse des existences, et ce fut dans un état de profonde misère qu'elle succomba à son tour, le 14 juillet 1871. »

L'existence de Guiraldenc fut donc faite tout entière de dévouement filial, de sacrifice obscur et d'honnêteté. Ses poésies[7] ne démentent rien des indications que M. Martin a bien voulu nous donner. Le cahier cartonné qui nous les a conservées est un in-8° de quatre-vingt-quatorze feuillets, à l'écriture fine, allongée, presque féminine, assez souvent semée de distractions de copie et d'involontaires fautes orthographiques. Point de titre. L'auteur, qui en cherchait un sans doute, a laissé pour lui sa première page à demi blanche. Les poésies françaises sont au nombre de quarante-trois, et celles en montpelliérain de douze.

Deux poésies latines et une pièce allemande attestent, en outre, l'étendue des connaissances linguistiques de Guiraldenc[8].

Presque tous les poëtes de la renaissance méridionale commencèrent par s'exercer en français. Guiraldenc ne faillit pas à la règle commune. Après une dédicace certainement faite après coup et dans laquelle il s'excuse de

                    donner des ailes
A son cœur, à ses sentiments,

on lit une parodie des imprécations de Camille dans les Horaces de Pierre Corneille. S'il faut en croire l'auteur, — et nous n'avons pas de raison de douter de sa parole littéraire, — Guiraldenc fit ses débuts poétiques à quinze ans, alors qu'il était encore sur les bancs du collége:

J'étais un écolier de quinze ans quand ma lyre
Émit le premier son pour honnir et maudire.
Il fallut composer en chimie un matin,
Et ce jour j'y perdis ma tête et mon latin.
De dépit je saisis ma plume et, frêle abeille,
Je butinai ma haine aux vers du grand Corneille.
Pour ce larcin d'enfant j'implore sa merci
Et la vôtre, lecteur; le larcin, le voici:
« O rage, ô désespoir, ô funeste chimie..... »

Ces imprécations d'un écolier ennuyé sont aisément rimées. Les autres vers français de Guiraldenc ont généralement l'allure facile et coulante, en dépit de certaines chevilles et de l'emploi d'une foule de périphrases et de formules communes à la poésie contemporaine. Des réminiscences de Lamartine percent au travers des premières pièces qu'il écrivit; plus tard, Victor Hugo dut avoir ses préférences; l'imitation des Feuilles d'automne est surtout sensible dans la seconde partie due recueil. En composant des vers sur le modèle de quelques-uns des poëtes de l'école romantique, Guiraldenc cherchait une voie nouvelle, mais il lui était difficile de la trouver dans une langue qui s'est prêtée à tant d'essais et à tant de maîtres, qui a exprimé des sentiments si divers, depuis Malherbe jusqu'aux parnassiens. Guiraldenc s'est fait — et quel poëte n'est-il pas un peu dans son cas? — des illusions sur ce point. Toujours est-il que plusieurs de ses inspirations ne sont dépourvues ni de délicatesse ni d'harmonie, encore moins d'invention et de facilité. Il ne serait permis nulle part de dédaigner la grâce discrète et voilée, presque hésitante çà et là, des vers adressés, avant leur départ de Montpellier, à quelques jeunes filles dont il avait partagé les jeux:

Puisse sur vous le ciel répandre ses bontés !
Puissent toujours la joie et les prospérités
    En lot vous échoir assurées !
Vivez pleines de jour, vivez libres d'ennui
Et portez quelquefois vos pensées vers celui
    Dont la muse vous a pleurées !

Dans la pièce sans titre: Que reste-t-il de vous, ô mes jeunes années ? l'inspiration de l'auteur se rattache directement aux vers bien connus de Victor Hugo: O mes lettres d'amour, de vertu, de jeunesse ! (Feuilles d'automne, XV); l'imitation, la copie pourrait-on dire, est presque flagrante. Et pourtant Guiraldenc a des strophes d'un ton aisé, naturel et poétique:

Il est là, le trésor que j'acquis en partage.
Serré dans un écrin, il est là, l'héritage
    De ceux que j'aime et j'ai perdus.
Et j'y touche souvent pour compter ma richesse,
Pour voir si tous mes biens s'y retrouvent sans cesse,
    S'ils sont distincts ou confondus.

Rien ne manque à l'appel; vigilante est ma garde,
Mais, de mon zèle ardent à veiller, qu'on n'ait garde
    De conclure à des monceaux d'or.
Moi, défendre un métal, adorer des idoles !
Elles ne valent pas ces biens, ces riens frivoles
    Dont se compose mon trésor.

......................................................

Je les pleure toujours, mais sur les morts, silence !
Voici d'autres débris. Salut, ô ressemblance,
    O traits chéris d'êtres aimés,
Qui viviez de ma joie et que mon cœur révère !
Vous vous cachez ? Faut-il arracher au mystère
    Vos noms du mystère charmés ?

Et le printemps a fui ! mais vos lettres charmantes,
O compagnons chéris, jeunes filles aimantes,
    Survivront encore aux saisons.
Une fois l'épi mur, la faux tranche la chaume,
Mais le grain reste après pour alimenter l'homme
    Et je vis, moi, de vos moissons !

Ces vers ne sont pas ceux d'un poëte ordinaire, et cependant, si Guiraldenc voit son nom recueilli un jour par l'histoire littéraire du midi de la France, il le devra moins à ses rimes françaises qu'aux douze pièces montpelliéraines de son recueil:

  1. A Madoumaisela Anna C[habanon], lou jour de sa festa.
  2. Souvenì d'una journada de mai.
  3. L'Age de vint ans.
  4. La Gloriousa.
  5. La Masca, obra ternenca.
  6. La Blanda, obra ternenca.
  7. A Madoumaisela.....
  8. A la Mount-pelieirenca.
  9. Lous Nouvels Troubadous, serenada.
  10. Lou Poutou.
  11. A Madoumaisela I[sabela] T[issiè].
  12. Lou Roussignòu.

Ces douze pièces, tout en étant inégales de mérite, attestent un talent plein de vigueur, d'abondance et de variété. Sans doute la langue de Guiraldenc n'est pas suffisamment assouplie, sa strophe est parfois obscure, parfois rebelle à la pensée qu'on veut lui faire exprimer. L'auteur se laisse aller, dans la Mount-pelieirenca, à des inspirations d'une médiocrité banale; il sacrifie, dans le Poutou, à une pensée qui n'a rien de bien élevé ni de bien naturel; il accueille, dans le Souvenì d'una journada de mai, des formules[9] qui avaient le tort d'être démodées au moment où elles entraient dans ses vers; il ne fuit pas assez l'hiatus produit par le choc de deux voyelles semblables[10], mais il montre aussi, en outre des qualités signalées plus haut, un souci réel de la langue, la connaissance de l'idiome populaire et l'ambition de tenter, en faveur du montpelliérain, une réforme semblable à celle que Mistral et Roumanille avaient réussie de l'autre côté du Rhône. Nous n'avons que de vagues indications sur les lectures de Guiraldenc, mais tout prouve qu'il appréciait comme il convient les félibres provençaux. Deux de ses pièces ont pour épigraphe des vers de la Mióugrano entreduberto d'Aubanel, et, d'autre part, la fréquence relative de ses provençalismes montre qu'il avait dû se familiariser d'assez bonne heure avec la littérature d'outre-Rhône. Les poésies de l'abbé Favre lui étaient connues; enfin l'Armana prouvençau, joio, soulas e passo-tèms de tout lou pople dóu Miejour, ainsi que l'explique son titre, avait dû être souvent la distraction favorite du pauvre jeune homme, que tant d'inquiétudes et d'adversités poursuivaient.

Lorsque Guiraldenc rimait ses premiers essais, Langlade n'avait encore rien produit, et l'on ne connaissait de Bringuier qu'une fable publiée par Roumanille, en 1862. Aujourd'hui que Nadau, l'ode A las raças latinas, le Garda-mas et les Las d'amour, ont à peu près complètement fixé la langue littéraire du montpelliérain et de sa variété de Lansargues, on n'apprécie plus aussi bien les difficultés que dut éprouver l'auteur de Blanda à manier l'instrument que Martin, Tandon et Bertrand lui avaient légué. Guiraldenc réagit d'abord contre les tendances de ses devanciers en écartant de son idiome tout ce qui était manifestement étranger ou corrompu, en revenant au langage du peuple et en employant les expressions et les verbes dans leur sens le plus étendu et par conséquent le plus ancien. La liste de ses poésies nous l'a montré tout à l'heure, à propos de ternenca, qui, dans le langage ordinaire, ne s'applique qu'à une brebis de trois ans, tandis que notre poëte s'en sert pour désigner une pièce en trois tableaux. Une partie de la population des villes conserve au substantif paire le sens de gérant ou de gardien d'une maison de campagne, mais elle lui refuse celui de père, qu'elle attribue au terme francisé de pera; la maire, pour elle, est la femme du paire et non la mère au sens primitif du mot; cor (cœur) a été rejeté au profit de cur, sous prétexte que le corps humain était déjà exprimé par le même vocable et qu'une confusion était possible entre eux; la feuille de papier est devenue une fulha, de crainte qu'elle ne fût confondue avec une feuille d'arbre (fiolha); nuage, fatiga, coursa et soucì, ont été substitués à nibou, lassige, escoussa et lagui. Guiraldenc rejeta ces formes douteuses ou corrompues; il voulut parler le véritable languedocien, comme Mistral, Roumanille, Aubenel et Tavan, avaient parlé le véritable provençal, et il y réussit presque toujours.

Il ne borna pas là son ambition, et il résolut aussi de donner au bas languedocien un vêtement graphique moins chargé d'accents graves, aigus et circonflexes, de trémas et de fantaisies typographiques que celui de ses devanciers. La publication des anciens textes et des vers des poëtes des XIIe et XIIIe siècles n'étant pas accessible à la modicité de ses ressources, il ne put connaître les règles des Leys d'amors, et il suivit celles de l'Armana, en les appropriant aux particularités dialectales du montpelliérain. Il rétablit le v dans tous les cas où la tradition latine et bas latine, ainsi que l'usage général l'autorisait; nota généralement un r simple dans ceux où la prononciation locale fait entendre un d (fieira, nieira, parura, pour fieida, nieida, paduda), et suivit avec bonheur sur une foule d'autres points secondaires l'exemple que lui avaient donné les poëtes des deux rives du Rhône. Moins heureux qu'eux, il vit la maladie et la misère se mettre au travers des idées qui lui étaient chères et lui en interdire le développement successif. Ce n'en est pas moins un honneur pour ce jeune homme d'avoir, dès l'âge de vingt-cinq ans, fixé dans ses lignes essentielles la réforme que Fabre d'Olivet et Théodore Paulinier avaient réalisée d'instinct et que Bringuier, puis Langlade, devaient compléter de 1870 à 1885. Il faut déplorer que la mort ait coupé dans sa fleur le 23 octobre 1869, cette précoce renommée[11].

Ce ne fut que neuf ans après qu'une sorte de réaction se fit autour de sa mémoire. M. Barthélemy Martin, qui avait connu de près le poëte qui n'avait pas ignoré les douleurs de son existence matérielle, voulut bien nous communiquer le manuscrit de ses vers; M. Hector Jonquet, avocat à la Cour d'appel de Montpellier, y ajouta plus tard quelques indications biographiques, et M. Edmond Servel, l'auteur bien connu d'un Soupir de Faust, le musicien dont la ville de Montpellier devait, peu de temps après, déplorer la perte, mit en musique la Gloriousa, qui faillit être chantée dans une des séances littéraires du mois de mai 1878[12]. Quelques mois plus tard, la Société pour l'étude des langues romanes adressait à M. Laissac, maire de la ville de Montpellier, une demande à l'effet d'obtenir une concession en faveur de la dépouille de l'auteur de la Blanda. En réponse à cette demande, le conseil municipal vota, le 4 septembre suivant, une somme de cent cinquante francs, et, le 4 décembre 1878, à trois heures de l'après-midi, l'exhumation eut lieu en présence du R. P. Tlomazinski, aumônier des dernières prières au cimetière Saint-Lazare; de M. le docteur Adelphe Espagne et du signataire de ces lignes, représentant tous les deux le bureau de la Société des langues romanes; de MM. Blanchard, employé municipal des pompes funèbres; Chenal, délégué du commissaire central, et Scipion Galavieille, parent de M. Barthélemy Martin.

La pierre tombale placée sur la dépouille du pauvre poëte ne porte que ces mots, qui sont l'abrégé de sa vie:

LOUIS-DIOGÈNE GUIRALDENC

MDCCCXL — MDCCCLXIX

Tus que trepes la vida, arresta·te 'n moument.
Ai pas viscut un jour qu'oun seguesse doulent,
E m'ajassere aici davans l'age trentenc.

(Toi qui chemines à travers la vie, arrête-toi un moment. — Je n'ai pas vécu un jour qui n'ait été triste pour moi, — et je me couchai ici avant l'âge de trente ans.)

A. Roque-Ferrier.

Observations

  1. ^ Dix pièces de Guiraldenc: Souveni d'una journada de mai, la Gloriousa, la Masca, la Blanda, A Madoumaisela…, A la Mount-pelieirenca, lous Nouvels Troubadous, lou Poutou, A Madoumaisela I[sabela] T[issiè] et lou Roussignòu, ainsi que des extraits de l'Age de vint ans et d'une autre pièce, ont été publiées et annotées par moi dans la Revue des langues romanes. Commencé en 1880 (3e série, t. III, p. 220), ce travail a pris fin au mois de décembre 1882 (3e série, VIII, p. 281).

    Voyez sur Guiraldenc deux mentions, 2e série, VI, 288 et 305.

  2. ^ Les poésies de Guiraldenc étaient, en 1878, aussi complètement ignorées que les circonstances qui les firent naître. L'obligeance de M. Martin m'a permis de connaître les unes et les autres. Je lui en témoigne ici mes remerciements les meilleurs. Des trouvailles comme la sienne sont trop rares et trop précieuses à la fois pour n'être pas signalées à la reconnaissance des érudits.

  3. ^ Trois pièces sont adressées à la pauvre femme dans le recueil dont nous devons la connaissance à M. Martin.

    Sous les exagérations du langage poétique, il est facile de deviner la puissance du sentiment que Guiraldenc avait voué à celle qui lui donna le jour:

    Ah ! d'abnégation, de dévoûment sans borne
    Elle (une mère) meurt, mais de ces fleurs elle orne,
    Sans jamais se lasser, le front de son enfant.
    Sa tendresse est semblable à l'Océan immense
    Qui baigna tous ses bords, que finisse ou commence
            Le couchant, le levant.

    Dieu le voulut ainsi. Dieu fit bien tout chose.
    Il donna la beauté, le parfum à la rose,
    Et la lune à la nuit, et le soleil au jour;
    Et, pour que sa bonté fût partout dépensée,
    L'innocence à l'enfant, à l'homme la pensée,
            A la mère l'amour.

    Ma mère, tu n'as pas mesuré ta tendresse.
    Je la vois tous les jours inonder ma jeunesse,
    Enrichir et combler mon sein de tes trésors.
    Je vois ton sacrifice et ta sollicitude
    Veiller à mon chevet avec inquiétude
            Pendant que je m'endors !

  4. ^ Guiraldenc établit alors le catalogue des riches collections bibliographiques de M. Louis Tissié.

  5. ^ Chose curieuse, Coulet est mort sans avoir jamais rien imprimé. Il réservait ses poésies à sa famille et à un petit cercle d'amis.

    J'ai signalé deux vers d'une pièce qu'il écrivit à propos du séjour de Mistral à Montpellier. (Voyez Société des langues romanes, le Concours littéraire et philologique de l'année 1875, p 75.) C'est peut-être tout ce qui reste aujourd'hui des nombreuses poésies de cet excellent homme.

  6. ^ L'inhumation eut lieu le 24 octobre 1869, au cimetière St-Lazare, n° 1325, section R. S., n° 83.

  7. ^ Elles ont été données par M. Barthélemy Martin aux archives de la Société pour l'étude des langues romanes.

  8. ^ Voici ces deux poésies:

    A MES MEILLEURS AMIS, MM. A. ET J. J.

    Donec erit tecum mea, dulcior, Arthur, imago,
        Corde tuo hærebunt nomina Diogenis
    Hæc solum a cœlo peto : fortunatus abunde
        Si novim semper te meminisse mei

    Mitto tibi effigiem, Juli carissime, nostram
        Nostrā cum effigie pignus amicitiæ
    Nunc solvi promissa diu : non omnis abido
        Mente tuā ut nostræ sæpius omnis ades.

    A MON AMI FERNAND T.....

    Cordibus in nostris manet æternumque manebit
    Fernandi effigies cara; at mihi carior ille.

    Guiraldenc a fait suivre ces deux vers latins d'une traduction en vers français:

    Votre image, Fernand, reste et restera chère.
    Dans mon cœur à jamais, Fernand, je vois préfère.

    Le pièce allemande suit dans le manuscrit le sonnet languedocien A Madoumaisela I[sabela] T[issiè]. Nous la reproduisons, moins pour le mérite de la poésie et la correction de la langue, qui laissent extraordinairement à désirer, que parce qu'elle constitue probablement la seule et unique pièce composée par un Montpelliérain dans l'idiome de Goethe et de Schiller:

    Lang hinfort Sie werden leben,
    Isabelle! auch Ihr Licht
    Wird sich, wie Mond auf Bergen heben;
    Glænzt Ihre Schænheit umher nicht?

    Jetzt die Frühlingsblumen geben
    Ihre Farbe Ihrem Gesicht
    Und sonst ewig Krænzen eben
    Ihr Haupt das sich edel erricht.

    Lassen Sie noch das Herz hoffen !
    Der Kranz wird nicht welken, Fræulein
    Bleibt Ihr Bildniss immer offen

    Damit Sie man sehe hinein
    Und so das Bild ist getroffen
    Isabelle, erscheint allein.

    Dans le sonnet français: Ah! vous vivrez longtemps désormais, Isabelle, Guiraldenc a essayé de traduire les vers allemands que l'on vient de lire.

  9. ^ Lou vent dau mau, lou cagnard dau plesì, etc.

  10. ^ En voici deux exemples, pris au hasard :

    E era hurous d'auntau la poussedà.

                                (Lous Nouvels Troubadous.)

    Age de fe e de gaud d'amour.

                                (L'Age de vint ans.)

  11. ^ La légitimité de la réaction philologique dont les idiomes méridionaux ont été l'objet n'est aujourd'hui contestée que par un très-petit nombre de personnes. Il m'a cependant paru bon de signaler, au moyen des notes qui suivent, ce qui, dans les vers de Guiraldenc, n'est pas absolument conforme à la moyenne générale du languedocien parlé à Montpellier ou dans ses faubourgs, tout ce qui, en un mot, accuse le souvenir de la lecture des félibres, ainsi que des influences lodévoises ou provençales.

    Je dois aller ici au devant d'une objection qui pourrait être faite, et dire qu'une foule de termes que la généralité des Montpelliérains croit être des provençalismes existent aux environs de Montpellier, et surtout dans le rayon de Lansargues. On peut donc, à un point de vue purement philologique, les considérer comme foncièrement languedociens. Toutefois, Guiraldenc ne les ayant pas connus par l'intermédiaire de Langlade, qui n'avait encore rien publié, j'ai cru convenable de voir en eux des emprunts au vocabulaire des félibres et de les classer ainsi dans mes notes. Il en est, d'ailleurs, un assez grand nombre qui ne se retrouvent pas à Lansargues et qui sont, non pas des provençalismes dans le sens général que les Montpelliérains attachent à ce mot, mais de véritables et très-réels emprunts à l'idiome de Mirèio.

  12. ^ Cette pièce a été gravée en 1880, mais son titre, que je reproduis ce-après, a été cruellement défiguré par diverses coquilles:

    La Gloriousa, padaoulas (pour paraulas) di (pour de) D. Guiraldenc, musica di (pour de) Ed. Servel. Montpellier, Léon Moitessier, in-40; 6 pages.

Appendice

Dans la première édition des poésies de Guiraldenc, je n'ai donné que des extraits de ces pièces, qui occupent le premier et le troisième rang chronologique parmi les œuvres languedociennes de l'ancien secrétaire de Cambouliù.

Cédant aux conseils de quelques amis, je prends le parti de les publier aujourd'hui en entier, avec les notes et les éclaircissements qu'elles comportent.

  1. À Madoumaisela Anna C.
  2. L'age de Vint Ans

La Tombe de Guiraldenc

La mention finale de l'introduction biographique et littéraire nous impose le devoir de nommer et de remercier à la fois les personnes suivantes, qui ont bien voulu contribuer de leur obole à la pierre tombale placée sur les restes de Guiraldenc:

MM. Bouquet, ancien caissier à la Trésorerie générale de l'Hérault; Daulet, notaire; Estellé, propriétaire; Plaissier, propriétaire; Hector Jonquet, avocat à la Cour d'appel de Montpellier; Kleinschmidt, docteur en médecine; Barthélemy Martin, bijoutier, Nozeran, docteur en médecine et Roque-Ferrier.

En complétant la délibération prise le 4 septembre 1878 par le Conseil municipal de Montpellier, le témoignage de ces amis de la première heure justifie une fois de plus les sympathies que le malheureux auteur de la Blanda avait rencontrées autour de lui.

English translation

The following is my translation of the original introduction, appendix, and final note of acknowledgements above, including the poems and fragments of poems presented therein, with the exception of the Latin and German poems.

Disclaimer: While my French is improving, it is still not fluent. This translation is part of my effort to learn, and errors may happen. I welcome corrections and insights that might help me improve. You can contact me at sebastian@stveje.dk.

Diogène Guiraldenc

His Life and Poems in Languedocian and French

The one whose languedocian poems[1] we shall read later died at Montpellier on October 23, 1869, without anyone, except perhaps two or three friends, suspecting the loss to the philology and literature of the southern idioms.

Nothing sadder, more heartbreaking even, than the poor poet's existence: "Diogène Guiraldenc —" Monsieur Barthélémy wants to tell me[2], in a biographical note of which I reproduce the emotional lines "— was born in Montpellier on the November 1, 1840, in a house on Rue Argenterie, from the marriage of Jean-François Guiraldenc, former non-commissioned officer of engineering, later small grocer merchant, and Marie-Marguerite-Josephine Coudougnion. The death of his father left him almost destitute at the age of eleven.

"The poet's mother was a scrawny creature, unable to carry on her husband's business or even earn a living in any other way. Resigning herself to misery, she accepted a position as concierge at the house in which she lived; but she could not stand to make her child, frail like herself, end the studies he had begun; she did not want to impose on him the hard work of the workshop. By one of those miracles of which mothers alone know the secret and at the cost of innumerable sacrifices, she managed to keep him in high school until he had obtained his two baccalaureates."

In one of his pieces, our poet thus speaks of his youth, of his readings, and of his early literary ambitions:

Oh candid youth, to your noble attitude
Was united peace, the veneration of study,
An attraction towards the true, the beautiful, the good,
Love and friendship, both of them my support.
How happy I was in my humble abode,
Close to my lone mother who wanted from an early age
To instruct my spirit to better temper my heart,
Who spared neither good, nor health, nor toil!
How happy I was to admire the engineers
Of Greece and Rome in their blessed works,
And, without fixed purpose, to gather at random
The eternal masterpieces of their tongue and art!
Oh! if you'd seen me, taken by a feverish ardor,
From our authors wearing out the harvest too vast,
Only deigning to stop before the biggest, the ripest
ears of corn, which offered me their writings,
Then to this pure wheat from the north of our France
Trying to mix the honey of Provence,
This honey which another century almost exhausted
And which a new swarm...........
......................
Now piles up at the bottom of its cell.
Would you blame my wishes for this lost time
Wherein I sank my days in happiness,
In the bliss which I owe to my mother?
Alas! when to death succumbed my dear father,
I had seen ten springs, and I didn't know
How to measure my pain against the emptiness of death!
Why hadn't he lived? Now my homage
Apportioned between them the prize of their work!

"Guiraldenc began quite young to give a few lessons; as modest as this resource was, he was in no position to neglect it.

"Next he dreamed of studying medicine, for which he had a certain inclination, and, during the preparation for his baccalaureates, he already attended classes at the school and followed the students at the hospital.

"The position of laboratory assistant at the Faculty of Sciences having become vacant, Guiraldenc tried to obtain it, with the hope of advantageously pursuing his studies there. Unfortunately for him, his health, already faltering and profoundly changed by deprivation and fatigue, forced him to retire.

"We will be forgiven for going into some details here that bring out everything that's touching in the life of our poet.

"Guiraldenc loved his mother to a fault, and, to preserve for the poor woman the humble office that her strength did not always allow her to fulfill, it was he who aided her in her most painful work. He was the first to get up and the last to go to bed at the house. It was also he who went to get water, who brought up the wood, cleaned the stairs, without a complaint ever escaping his lips[3].

"Guiraldenc began this hard work from his first years, while he was in middle school, and only stopped it a few days before his death.

"The youth of our poet had, however, resisted the beginnings of the disease which afflicted him. He even recovered quite well, and contented himself with his lessons until 1863.

"At that time, wanting to get out of a very precarious situation, he had the idea of entering the customs administration, successfully applied and, after two years as a supernumerary (February 1, 1863 - February 1, 1865), was appointed clerk at Peschiers (administration of Toulon).

"The day of this impatiently awaited appointment was one of happiness for the son and the mother, but it was to remain short-lived.

"By a strange fate, the widow Guiraldenc became persuaded that the climate at Peschiers would be adverse to the health of her child and that he would inevitably succumb to it. Nothing could overcome her blind terrors. Guiraldenc, realizing that his mother's life depended on his decision, resigned.

It was two wasted years and a new career to be found. Guiraldenc, aged twenty-five, did not know which way to go. For another two years, he stagnated, pushed in various directions by the people who cared for him. It was in this way that he crossed the offices of the paymaster of the Hérault department, then those of the Tissié-Sarrus banking house[4], where he was to find in Monsieur Coulet[5] the last contemporary of the Tandon school and the Rigaud brothers. He then became assistant to Monsieur Béchamp, then professor of chemistry at the Faculty of Sciences, and finally secretary to Monsieur Belin, professor of rhetoric at Montpellier High School.

"Thanks to the affectionate kindness of M. Belin, Guiraldenc, who moreover found himself in the environment that suited him, regained a little confidence; but his hopes were soon to be dashed. M. Belin died in the month of June, 1868, and the unfortunate young man again remained without position and without support.

"One of this late master's best friends, Monsieur Cambouliù, then in all the brilliance of his teaching at the Faculty of Letters at Montpellier, took pity on the unfortunate Guiraldenc and wanted to attach him to himself as secretary. The brilliant professor had just founded the Society for the Study of Romance Languages, and he hoped for the best results. Guiraldenc also promised himself to find in it elements of study and success, when death decided otherwise, both for the master and the pupil.

"Cambouliù fell ill, and his condition soon took on such seriousness that Guiraldenc had no illusions for long about the new blow that was about to strike him. The extent of his setbacks was henceforth fulfilled: the illness that was undermining him made rapid progress, and he died on October 23, 1869, at the age of twenty-nine[6]. M. Cambouliù survived him by a mere three days.

"Guiraldenc's poor mother continued, for almost two years, the most painful of existences, and it was in a state of profound misery that she in turn succumbed on July 14, 1871."

Guiraldenc's existence was therefore made up entirely of filial devotion, obscure sacrifice, and honesty. His poems[7] belie nothing of the indications that M. Martin was good enough to give us. The hardcover notebook that has preserved them for us is an octavo of ninety-four pages, with fine, elongated, almost feminine writing, quite often strewn with copying distractions and involuntary spelling errors. No title. The author, who was no doubt looking for one, left the first page half blank. The French poems are forty-three in number, and twelve in montpellieran.

Two Latin poems and a German piece also attest to the extent of Guiraldenc's linguistic knowledge[8].

Almost all the poets of the southern renaissance began by practicing in French. Guiraldenc doesn't break from the rule. After a dedication undoubtedly made after the fact and in which he apologizes for

                    giving wings
to his heart, and his sentiments,

we read a parody of Camille's imprecations in Pierre Corneille's Horace. If the author is to be believed, — and we have no reason to doubt his literary word, — Guiraldenc made his poetic debuts at the age of fifteen, while he was still in middle school:

I was a pupil of fifteen years when my lyre
Emitted the first sound to shame and to curse.
An assignment I had to complete one morn in chemistry,
And that day I quite lost my head and my Latin.
In spite of myself I grabbed my pen and, frail bee,
Harvested my hate from the verses of the great Corneille.
For this childish theft I beg his mercy
And yours, reader; the petty theft, here it is:
"Oh rage, oh hopelessness, oh baneful chemistry..."

These imprecations of an annoyed student are easily rhymed. Guiraldenc's other French verses generally have an easy and flowing pace, despite certain filler words and the use of a multitude of periphrases and formulas widespread in contemporary poetry. Hints of Lamartine appear throughout the first pieces he wrote; later, Victor Hugo must have been his favorite; the imitation of Feuilles d'automne is especially felt in the second part of the collection. While composing verses on the model of some of the poets of the romantic school, Guiraldenc was searching for a new path, but it was difficult for him to find it in a language that has lent itself to so many attempts and so many masters, which has expressed so many diverse sentiments, from Malherbe to the Parnassians. Guiraldenc had deluded himself — and which poet would not have a little in his case? — on this point. Still, many of his inspirations are not devoid of delicacy or harmony, even less invention and ease. Nowhere would it be permitted to disdain the discreet, veiled grace, almost hesitating here and there, of the verses addressed, before their departure from Montpellier, to some of the young girls with whom he had spent his childhood:

May the sky shed its kindness upon you!
May ever joy and prosperity in good fortunes
    assuredly befall you!
Live full of daylight, live free of troubles
And occasionally direct your thoughts towards he
    whose muse cried for you!

In the untitled piece: What remains of you, oh my years of youth? the inspiration of the author directly relates to the well-known verses of Victor Hugo: Oh my letters of love, of virtue, of youth! (Feuilles d'automne, XV); the imitation, the copying one might say, is almost blatant. And yet, Guiraldenc also has strophes with an easy, natural, and poetic tone:

’Tis here, the treasure I acquired by sharing.
Safe in a jewel box, it is here, the legacy
    Of those I love and that I've lost.
And often I touch it to count my wealth,
To see if my possessions are ever there,
    Whether they are clear or mixed up.

They all answer my call; vigilant is my watch,
But, from my ardent zeal to watch, careful not
    To imagine piles of gold.
For me to defend metals, worship idols!
Worthless all compared to these frivolous nothings
    Of which I compose my treasure.

......................................................

I mourn them always, but for the dead, silence!
Here is other debris. Hello, oh resemblance,
    Oh cherished traits of beloveds,
Who lived on my joy and whom my heart reveres!
Do you hide? Must I uproot from obscurity
    Your names of charmed mystery?

And spring has fled! But your charming letters,
Oh dear companions, young girls beloved,
    Will yet survive the seasons.
Once the ears of corn ripen, the scythe cuts the stubble,
But the grain remains to feed the man
    And I live on your harvests!

These are not the verses of an ordinary poet, and yet, if Guiraldenc one day sees his name appear in the literary history of the south of France, it will be less because of his French rhymes than because of the twelve montpellieran pieces from his collection:

  1. A Madoumaisela Anna C[habanon], lou jour de sa festa.
  2. Souvenì d'una journada de mai.
  3. L'Age de vint ans.
  4. La Gloriousa.
  5. La Masca, obra ternenca.
  6. La Blanda, obra ternenca.
  7. A Madoumaisela.....
  8. A la Mount-pelieirenca.
  9. Lous Nouvels Troubadous, serenada.
  10. Lou Poutou.
  11. A Madoumaisela I[sabela] T[issiè].
  12. Lou Roussignòu.

These twelve pieces, while unequal in merit, attest to a talent full of vigor, abundance, and variety. Without doubt the language of Guiraldenc isn't sufficiently supple, his strophes are sometimes obscure, sometimes rebelling against the thought we expect him to express. The author lets himself follow, in la Mount-pelieirenca, inspirations of a prosaic mediocrity; he sacrifices, in lou Poutou, to a thought that has nothing high or natural about it; he embraces, in Souvenì d'una journada de mai, formulas[9] which have the flaw of being outdated from the moment they entered his verses; he doesn't sufficiently follow the hiatus produced by the shock of two similar vowels[10], but he also shows, besides the qualities indicated above, a real concern for the language, knowledge of the popular tongue and the ambition to attempt, in favor of montpellieran, a reform like that which Mistral and Roumanille succeeded with on the other side of the Rhône. We only have vague indications of the readings of Guiraldenc, but everything shows that he appreciated, as is appropriate, the félibres of Provence. Two of his pieces have for epigraph verses from Aubanel's Mióugrano entreduberto, and, elsewhere, the relative frequency of his provencialisms shows that he must have familiarized himself quite early with the literature from across the Rhône. The poetry of Abbot Favre was known to him; finally, the Armana prouvençau, joio, soulas e passo-tèms de tout lou pople dóu Miejour ("Provencal Almanac, joy, consolation and pastimes for all the people of the south of France"), as its title suggests, must have often been the favorite distraction of the poor young man, who so many worries and adversities pursued.

When Guiraldenc made his first forays into rhyming, Langlade had yet to produce a thing, and of Bringuier we only knew one fable published by Roumanille, in 1862. Today, when Nadau, the ode A las raças latinas, the Garda-mas and Las d'amour have more or less completely fixed the literary language of montpellieran and its variety from Langsargues, we no longer appreciate the difficulties enough which the author of La Blanda must have faced in handling the instrument that Martin, Tandon, and Bertrand had bequeathed to him. Guiraldenc reacted at first against the tendencies of his precursors, by removing from his language all that which was manifestly strange or corrupt, by returning to the language of the people and by employing the expressions and the verbs in their most widespread and consequently their oldest sense. The list of his poems showed it earlier, regarding ternenca, which, in the ordinary language, only applies to a ewe of three years, while our poet uses it to designate a piece of three acts. A part of the population of the cities conserve the noun paire in the sense of manager or caretaker of a country house, but not that of father, which they attribute to the frenchified term pera; the maire, for her part, is the wife of the paire and not the mother in the primitive sense of the word; cor (heart) has been rejected in favor of cur, on the pretext that the human body was already expressed by the same vowel and that a confusion was possible between them; a sheet of paper has become a fulha, for fear that it should be confused with the leaf of a tree (fiolha); nuage, fatiga, coursa, and soucì have been substituted for nibou, lassige, escoussa, and lagui. Guiraldenc rejected these doubtful and corrupted forms; he wanted to speak the true languedocian, like Mistral, Roumanille, Aubanel and Tavan had spoken the true Provençal, and he almost always succeeded.

He didn't end his ambition there, and also resolved to give to the lower languedocian a writing system less full of grave accents, acute acute accents, circumflexes, tremas and other typographical fantasies like those of his predecessors. With the publications of ancient texts and verses from the 12th and 13th centuries being inaccessible with his modest resources, he could not know the rules of the Leys d'amors, and he followed those of the Armana, while adapting them to the dialectical particularities of montpellieran. He reestablished the v in all cases where the Latin and Low Latin traditions, as well as the general usage allowed it; generally used a single r in those where the local pronunciation exhibited a d (fieira, nieira, parura for fieida, nieida, paduda), and happily followed on a wealth of other secondary points the example which the poets of the two sides of the Rhône had given him. Less happy than them, he saw the illness and misery get in the way of the ideas which were dear to him and preventing him from their further development. It is no less an honor for this young man to have, from the age of twenty-five, fixed in his essential lines the reform which Fabre d'Olivet and Théodore Paulinier had realized instinctively and which Bringuier, then Langlade, would complete from 1870 to 1885. We must deplore that death nipped this early fame in the bud, on October 23 1869[11].

It was only nine years later that a sort of reaction was had to his memoir. M. Barthélemy Martin, who had known the poet closely and had not been unaware of the pains of his material existence, wanted to communicate to us the manuscript of his verses; M. Hector Jonquet, lawyer at the appellate court of Montpellier, later added to it a few biographical notes, and M. Edmond Servel, the well-known musician and author of Un Soupir de Faust which the city of Montpellier would, not long after, deplore the loss of, put La Gloriousa to music, which was almost sung in one of the literary sessions of the month of May 1878[12]. A few months later, the Société pour l'étude des langues romanes addressed to M. Laissac, mayor of the city of Montpellier, a request to the effect of obtaining a concession in favor of the remains of the author of La Blanda. In response to this request, the municipal council voted, the following September 4, a sum of 150 francs, and, December 4 1878, at 3 in the afternoon, the exhumation took place in the presence of R. P. Tlomazinski, chaplain of last prayers at the cemetery of Saint-Lazare; of Doctor Adelphe Espagne and the signatory of these lines, both representing the office of the Société pour l'étude des langues romanes; of Messieurs Blanchard, municipal funeral home employee; Chenal, delegate of the central commissioner, and Scipion Galavieille, relative of M. Barthélemy Martin.

The gravestone placed above the remains of the poor poet carry only these words, which are the synopsis of his life:

LOUIS-DIOGÈNE GUIRALDENC

MDCCCXL — MDCCCLXIX

Tus que trepes la vida, arresta·te 'n moument.
Ai pas viscut un jour qu'oun seguesse doulent,
E m'ajassere aici davans l'age trentenc.

(You who walk through life, pause a moment. — I have not lived a day which was not sad to me, — and I rest here before the age of thirty.)

A. Roque-Ferrier.

Observations

  1. ^ Ten pieces by Guiraldenc: Souveni d'una journada de mai, la Gloriousa, la Masca, la Blanda, A Madoumaisela…, A la Mount-pelieirenca, lous Nouvels Troubadous, lou Poutou, A Madoumaisela I[sabela] T[issiè] and lou Roussignòu, as well as extracts from Age de vint ans and one other piece, were published and annotated by me in the Revue des langues romanes. Begun in 1880 (3rd series, t. III, p. 220), this work ended in the month of December 1882 (3rd series, VIII, p. 281).

    See two mentions on Guiraldenc, 2nd series, VI, 288 and 305.

  2. ^ The poems of Guiraldenc were, in 1878, as completely unknown as the circumstances under which they were born. M. Martin's obligingness allowed me to know both. I express my warmest thanks to him here. Lucky finds like his are both too rare and too precious not to be brought to the attention of scholars.

  3. ^ Three pieces are addressed to the poor woman in the collection, the knowledge of which we owe to M. Martin.

    Beneath the exaggerations of the poetic language, it is easy to divine the power of the feelings which Guiraldenc had devoted to the one who gave him life:

    Ah! Of selflessness, of devotion without limit
    She (a mother) dies, but with these flowers she adorns,
    Without ever tiring, the face of her child.
    Her tenderness is alike to the immense ocean
    Which bathes all its borders, which ends or begins
            The setting, the rising sun.

    God wanted it thus. God makes everything good.
    He gave the beauty, the perfume to the rose,
    And the moon to the night, and the sun to the day;
    And, that his goodness should be spent throughout,
    The innocence to the child, thought to man,
            To the mother, love.

    My mother, you have not measured out your tenderness.
    I saw it every day inundate my youth,
    Enriching and filling my chest with your treasures.
    I see your sacrifice and your concern
    Watching over my bedside with worry
            While I sleep!

  4. ^ Guiraldenc thus became part of the catalog of rich biographical collections of M. Louis Tissié.

  5. ^ Curious thing, Coulet died without having ever printed anything. He reserved his poems for his family and a small circle of friends.

    I've highlighted two verses from a piece which he wrote about the journey of Mistral to Montpellier. (See Société des langues romanes, le Concours littéraire et philologique de l'année 1875, p 75.) It is perhaps all that remains today of numerous poems by this excellent man.

  6. ^ The burial took place on October 24, 1869, in the St-Lazare cemetery, nr. 1325, section R. S., nr. 83.

  7. ^ They were given by M. Barthélemy Martin to the archives of the Société pour l'étude des langues romanes.

  8. ^ Here are these two poems:

    TO MY BEST FRIENDS, MM. A. ET J. J.

    Donec erit tecum mea, dulcior, Arthur, imago,
        Corde tuo hærebunt nomina Diogenis
    Hæc solum a cœlo peto : fortunatus abunde
        Si novim semper te meminisse mei

    Mitto tibi effigiem, Juli carissime, nostram
        Nostrā cum effigie pignus amicitiæ
    Nunc solvi promissa diu : non omnis abido
        Mente tuā ut nostræ sæpius omnis ades.

    TO MY FRIEND FERNAND T.....

    Cordibus in nostris manet æternumque manebit
    Fernandi effigies cara; at mihi carior ille.

    Guiraldenc followed these two Latin verses by a translation in French verse:

    Votre image, Fernand, reste et restera chère.
    Dans mon cœur à jamais, Fernand, je vois préfère.

    The German piece followed in the manuscript the languedocian sonnet A Madoumaisela I[sabela] T[issiè]. We reproduce it, less for the merit of the poem and the propriety of the language, which leaves extraordinarily much to be desired, but because it probably constitutes the sole and unique piece composed by a Montpellieran in the tongue of Goethe and Schiller:

    Lang hinfort Sie werden leben,
    Isabelle! auch Ihr Licht
    Wird sich, wie Mond auf Bergen heben;
    Glænzt Ihre Schænheit umher nicht?

    Jetzt die Frühlingsblumen geben
    Ihre Farbe Ihrem Gesicht
    Und sonst ewig Krænzen eben
    Ihr Haupt das sich edel erricht.

    Lassen Sie noch das Herz hoffen !
    Der Kranz wird nicht welken, Fræulein
    Bleibt Ihr Bildniss immer offen

    Damit Sie man sehe hinein
    Und so das Bild ist getroffen
    Isabelle, erscheint allein.

    In the French sonnet: Ah! vous vivrez longtemps désormais, Isabelle, Guiraldenc tried to translate the German verse which we just read.

  9. ^ Lou vent dau mau, lou cagnard dau plesì, etc.

  10. ^ And here are two examples, taken at random:

    E era hurous d'auntau la poussedà.

                                (Lous Nouvels Troubadous.)

    Age de fe e de gaud d'amour.

                                (L'Age de vint ans.)

  11. ^ The legitimacy of the philological reaction of which the southern languages have been the object is these days only contested by a very small number of people. It seemed a good idea however to highlight, by means of the notes that follow, that which, in the verses of Guiraldenc, doesn't absolutely conform to the general average of the languedocian spoken in Montpellier or in its suburbs, all that which, in a word, reveals the influence of the reading of the félibres, as well as lodévois or provençal influences.

    I must address here an objection which could be made, and say that a wealth of terms which the majority of Montpellierans believe to be provencialisms exist in the surroundings of Montpellier, and especially in the radius of Lansargues. We may then, from a purely philological point of view, consider them as functionally languedocian. Nonetheless, since Guiraldenc didn't know them by the intermediary of Langlade, who had yet to publish anything, I have believed it appropriate to see in them borrowings from the vocabulary of the félibres and to classify them as such in my notes. There are, moreover, quite a large number of them which aren't found in Lansargues and which are, not provençalisms in the general sense which Montpellierans attach to this word, but veritable very-real borrowings from the language of Mirèio.

  12. ^ This piece was engraved in 1880, but its title, which I reproduce hereunder, has been cruelly marred by diverse typos:

    La Gloriousa, padaoulas (for paraulas) di (for de) D. Guiraldenc, musica di (for de) Ed. Servel. Montpellier, Léon Moitessier, in-40; 6 pages.

Appendix

In the first edition of the poems of Guiraldenc I only gave extracts of the pieces which occupy the first and the third chronological position among the languedocian works of the former secretary of Cambouliù.

Yielding to the advice of a few friends, I decide to publish them today in their entirety, including notes and clarifications.

  1. À Madoumaisela Anna C.
  2. L'age de Vint Ans

Guiraldenc's Tomb

The final mention of the biographical and literary introduction imposes on us the duty to name and at the same time thank the following people, who wanted to contribute their modest money to the tombstone placed on the remains of Guiraldenc:

MM. Bouquet, former cashier at the General Treasury of the Hérault department; Daulet, notary; Estellé, business owner; Plaissier, business owner; Hector Jonquet, lawyer at the appellate court of Montpellier; Kleinschmidt, medical doctor; Barthélemy Martin, jeweler, Nozeran, medical doctor and Roque-Ferrier.

In completing the deliberation taken on September 4, 1878 by the municipal council of Montpellier, the testimony of these early friends shows once more the sympathies which the unfortunate author of La Blanda had encountered around him.